Cherche une occupation

Zephril était assise sur le petit muret de pierre qui délimitait la frontière entre le jardin et le verger, en train de croquer dans une pomme acidulée dont le jus lui coulait sur le menton. Silencieuse, elle regardait avec intérêt le manège d’un petit oiseau qui faisait l’aller-retour entre son nid et un buisson enchevêtré, sans doute pour apporter plus de consistance à sa petite maison. L’enfant avait du négocier dur avec Tae pour que celle-ci n’essaye pas d’aller attraper l’oiseau, et maintenant, la jeune louve était couchée à ses pieds, somnolent à demi dans la chaleur de cette fin d’après midi.

Le soleil était haut dans le ciel, et la chevelure rousse, quelque peu emmêlée, de la fillette faisait comme un halo de flammes autour de sa tête. Elle ne s’était pas éloignée de la maison, attendant avec impatience le retour de sa Maman qui était partie elle ne savait pas trop où. Papa était là, mais il était occupé dans son bureau, et Zephril savait très bien que occupé voulait dire qu’on ne pouvait pas le déranger. Et de toute façon, elle ne voulait pas rater le retour de sa maman, trop pressée de lui montrer le portrait qu’elle avait fait de Tae.

Soupirant un peu, l’enfant changea de position, sans faire trop de bruit pour ne pas effaroucher l’oiseau qui continuait son petit manège. Mais elle commençait à s’ennuyer et, jugeant qu’aller voir ce que faisait son père serait plus intéressant que de rester là, elle sauta à bas du muret, provoquant chez la louve un léger mouvement d’oreille.

Je vais voir Papa, tu peux rester là. Il ne voudra pas que tu rentres, de toute façon, parce qu’il travaille.

Lança-t-elle en s’éloignant, ses pieds nus frottant sans bruit l’herbe haute. Elle aimait bien marcher pieds nus, surtout quand il faisait chaud, et mettait ses chaussures le moins possible, c'est-à-dire, seulement lorsque ses parents lui demandaient de les mettre. Mais pour l’instant, personne ne surveillait ce qu’elle faisait, alors, personne ne lui dirait rien ! Zephril arriva rapidement dans le jardin, frôlant les dalles de marbre qui accompagnaient le visiteur jusqu’à la porte d’entrée. Poussant la porte de toutes ses forces, parce qu’elle était vraiment très lourde pour ses petits bras d’enfant, elle pénétra dans la maison silencieuse… et plutôt fraîche.

Frissonnant un peu, elle se dirigea vers le bureau de son père, sachant pourtant qu’il ne voulait pas être dérangé. Passant la tête par la porte entrouverte, elle contempla un moment la silhouette de son père, penché sur le bureau de bois, éclairé seulement par les rayons du soleil qui filtraient à travers les persiennes. Il avait l’air occupé, constata-t-elle avec dépit, hésitant encore sur la conduite à tenir. Si Tallagh l’avait entendu, du moins, il ne fit rien pour le montrer, et elle finit par tourner les talons, sans même lui poser une question. Grimpant jusqu’à sa chambre, elle fouina un peu pour en ressortir quelques secondes plus tard, portant triomphalement un petit livre d’images. Zephril savait lire, du moins, c’est ce qu’elle prétendait quand Teyn lui posait la question. Elle déchiffrait quelques lettres, tout au plus, mais ne l’avouerait jamais à quiconque.

Elle sortit dans le jardin, s’appuyant le dos contre le mur, à côté de la porte d’entrée, ouvrit le livre et, triturant les mèches qui lui retombaient sur les yeux, s’absorba dans la contemplation des images colorées.

Un bruit de galopade se fit entendre dans la plaine, et deux petites silhouettes apparurent sur l'horizon.
Le martèlement des sabots sur la terre sèche résonna dans tout le corps de la fillette en train de lire.
Son frère était de retour.

Accompagné de Quìmari et d'un des chevaux du troupeau qui paissait non loin aujourd'hui, il rentrait à toute vitesse.
Apercevant sa jumelle, il fit virer le grand étalon vers elle.
La crinière noire de l'animal battait au vent, fouettant le visage du petit garçon. Ses longues jambes blanches, zébrées de noir fendaient l'air dans un sifflement étrange.
Les yeux entièrement blancs cerclé de noir s'était posé sur Zephril. L'étalon semblait aveugle mais il ne l'était absolument pas. Sa croupe, zébrée, elle aussi, s'éleva légèrement lorsqu'il donna un petit coup de cul.
Les enfants n'avaient jamais compris pourquoi leur mère aimait particulièrement ce cheval... Papa ne savait pas pourquoi non plus d'ailleurs.

Le loup bondissait à coté de l'équidé. Son regard flamboyant se posa sur la louve et sa maîtresse, et il poussa un petit hurlement pour les prévenir qu'ils arrivaient .... Si elles ne s'en étaient pas encore rendu compte.
Sa fourrure blanche était agitée par le vent de sa course, et il riait à la façon des loups, en roulant sa langue en mirliton.

Teyn, sur le dos du grand étalon blanc souriait joyeusement et il faisait de grand signe a sa sœur.
Les deux animaux s'arrêtèrent en dérapage auprès de Zephril. Sans avoir massacrer ni le jardin, ni le potager. Maman aurait fait une crise de rage.

L'équidé s'inclina, permettant au jeune garçon de descendre en glissant le long de son épaule. Les yeux dorés de Teyn brillaient d'enthousiasme, et son sourire pouvait en rapporter avec celui de Papa quand il avait appris que Zephril et lui allait débarquer.
" Elle arrive ! Je l'ai vu par là-bas ! "

En même temps qu'il parlait, en Jumeau, il faisait de grand geste enthousiaste vers le ciel du Sud. Bien évidemment, il parlait de leur mère.
La dragonnière rentrait.
Tout comme sa sœur, Teyn était heureux quand ses parents étaient tous les deux là ( même s'il ne comprenait pas pourquoi ils s'isolaient souvent, en interdisant aux enfants d'entrer dans la chambre... Le gamin était encore trop petit pour comprendre xD )

" Tu viens avec moi le dire a Papa ? "

Sans attendre la réponse de la fillette, il partit entra en courant dans la maison, suivit du loup blanc qui bondissait à ses cotés. Quìmari et Teyn se quittaient rarement.
L'enfant et le louveteau gravirent rapidement l'escalier, le petit s'appuyant parfois sur la rampe de bois sculptée par sa mère.
Pendant la grossesse, Louve ne pouvait plus se battre mais elle s'ennuyait. Tous les objets en bois de la maison avaient eu droit a une petite visite... La rampe avait pris l'apparence d'un grand dragon des mers, comme celle que Talenka avait blessée sans savoir que c'était la jeune femme. Chaque écaille était rendue avec exactitude.

* Mon frère ! Sois prudent ! * Lui recommanda prudemment Quìmari lorsqu'ils déboulèrent dans le bureau de Tallagh.
Malheureusement, Papa n'était pas seul.

Oh non ! Ne vous imaginez rien ! Il était en compagnie de Vlos, le père de Quìmari, et de Senger, le chef de la meute. Les deux loups lui donnaient parfois un petit conseil que les jeunes ne parvenaient pas à comprendre.

" PAPA !! PAPA !!! " Cria Teyn ( On plaint Tallagh )

Quìmari prit une attitude humble face aux loups les plus importants de la Meute ( Papa comprit ). Senger reposa sa tête sur le sol, ses yeux noirs posés sur les enfants. Vlos semblait un peu plus en colère, mais il n'avait jamais été patient...

" Maman ... " Le petit s'interrompit, a bout de souffle. " Maman arriv..."
Il fut coupé par un terrible rugissement venu du ciel.
Maman et Adana arrivaient visiblement. Eldar était plus polis et évitait de hurler ainsi.
Le lien de dragonnier entre Louve et Eldar avait été brisé lorsque Adana était revenue, mais elle était restée très amie avec le grand dragon bleu.

Zephril déchiffrait tranquillement son petit livre, quand un martèlement régulier lui fit lever la tête. Un grand sourire s’épanouissait sur son visage avant même qu’elle ne puisse distinguer ce qui produisait ce bruit. Elle le savait d’instinct, tout comme Tae, qui entre-temps était venu la rejoindre, savait qui arrivait ainsi : Teyn et Quìmari. Un peu admirative, la fillette observa l’arrivée en fanfare de son frère, regardant avec attention sa folle cavalcade. Pas qu’elle soit une peureuse, non, loin de là, mais l’étalon de Maman l’avait toujours impressionné. Il était grand, très grand, et, à la différence de Teyn, elle n’osait pas monter dessus.

Son petit frère avait toujours été le plus casse-cou des deux, même si Zephril était rarement en reste. Par contre, elle savait très bien la limite entre le danger et la sûreté, et c’était elle la plus raisonnable des deux… du moins, quand elle le décidait, parce qu’elle pouvait aussi s’avérer très entêté, et quand elle choisissait de faire quelque chose, hors de question de lui faire changer d’avis !

Zephril tendit la main pour caresser la douce fourrure de Tae en regardant les garçons se rapprocher rapidement, et sourit en entendant le hurlement de Quìmari, qui courrait à longues foulées aux côtés de l’enfant et du cheval fougueux. La fillette se leva et descendit les quelques marches, sans même tressaillir quand son frère fit déraper le cheval à côté d’elle, sautant à terre avec un grand sourire, ses joues encore rouges d’avoir été battues par la crinière de l’étalon.

Quand Teyn lui rapporta qu’il avait vu leur mère arriver, les yeux dorés de l’enfant se portèrent vers le ciel bleu, désespérément vide pour l’instant. Mais elle ne mettait jamais en doute la parole de son frère et, contaminée par son enthousiasme, répondit par l’affirmative à sa question… avant de se rappeler que leur père était occupé ! Mais le garçonnet avait déjà disparu dans le couloir, et Zephril le poursuivi en courant.

Attends, Teyn ! Papa fait quelque chose, on ne doit pas le déranger.

Mais Teyn ne s’arrêta pas, et l’enfant douta même qu’il ait entendu. Suivit par une Tae au petit trot, elle grimpa les marches le plus vite possible, un peu furieuse de ne pas avoir été la première à prévenir leur père de l’arrivée de Maman. Teyn était toujours au courant avant elle, s’était complètement injuste ! Qui s’occuperait de donner à boire aux fleurs de Maman si, comme Teyn, elle était toujours dans les champs à courir avec les chevaux ? Ce n’était vraiment pas juste, et elle comptait bien dire à Teyn que la prochaine fois, il devrait l’attendre !

Teyn avait déjà fait irruption dans le bureau de leur père, et la fillette, profitant de l’occasion, se glissa à ses côtés. C’est là qu’elle aperçut les deux loups aux cotés de son père, et qu’elle se rendit compte que finalement, il y avait peut-être une raison valable de leur interdire d’entrer dans le bureau à tout bout de champ. Mais pour couper court à une éventuelle réprimande, elle se joignit aux explication de son petit frère en s’avançant vers le dragonnier, un grand sourire aux lèvres.

Elle va arriver, Maman…

Le rugissement d’Adana retentit, et Zephril eut le réflexe de se boucher les oreilles. Elle aimait bien les dragons, mais ils étaient trop bruyants pour elle. Pourtant, ses propres cris ne la dérangeaient pas, mais ceux des autres, c’étaient autre chose ! Tae était restée à la porte, et Zephril observa avec un intérêt non dissimulé la réaction de Senger et de Vlos à l’arrivée plutôt brutale des jumeaux. Ils n’avaient pas l’air content, mais de toute façon, les adultes régleraient ça plus tard. Pour l’instant, une seule chose comptait : Maman était de retour.

Levant ses grands yeux vers son père tout en repoussant une mèche qui lui retombait sur le nez, elle demanda d’une petite voix suppliante.

Tu viens dehors avec nous ?

Tallagh était dans son bureau, en train de rédiger un ordre de mission pour effectuer une reconnaissance avec quelques uns des dragonniers de Galbatorix. Tout du moins, il s’était installé dans son bureau, après le repas des jumeaux, avec la ferme intention de le faire. C’était sans compter l’arrivée soudaine de deux éminents membres de la Meute, qui avaient interrompus son travail.

Le dragonnier les avait fait entrer dans son cabinet de travail, une petite pièce aux murs blancs et aux poutres apparentes. Une petite fenêtre permettait de la rendre claire et agréable, et les murs étaient égayés par quelques dessins d’enfants, représentant leur famille, la nature. La plupart étaient ceux de Zephril, qui insistait pour que l’on accroche tous les siens, mais certains étaient signés de Teyn, un peu moins prompt à se mettre en avant. Les deux enfants étaient doués, cela ne faisait aucun doute, et Tallagh, en père complètement gaga de sa progéniture, adorait leurs peintures.

Quand la porte s’était ouverte une première fois, Tallagh était encore seul. Il avait reconnu le léger pas de sa fille, mais savait d’avance qu’elle ne lui demanderait rien et s’éclipserait d’elle-même. La plupart du temps, elle voulait juste s’assurer qu’il était là, et repartait comme elle était venu. Cela faisait sourire le dragonnier, qui savait qu’aucun des jumeaux ne risquaient grand-chose, surveillés de près comme par chacun des membres de la famille, un peu particulière. Tal’ avait lui-même prévenu son dragonnier que Teyn était parti avec Quìmari dans les pâturages, et le Parjure, satisfait, ne s’inquiétait pas trop pour eux.

Mais quand Tallagh entendit son fils monter quatre à quatre les escaliers, il ne put retenir un sourire à l’idée qu’il se passait quelque chose. Quoi, il le savait à peu près, les deux loups l’ayant averti, entre autre, que Louve serait bientôt à la maison. Mais l’arrivée en fanfare de Teyn, suivi de sa sœur quelques secondes après, lui arracha un petit rire. Apparemment Vlos et Senger ne trouvaient pas ça drôle, mais Tallagh le savait, les loups avaient un sens de l’humour et de la dignité bien à eux et, malgré toutes les leçons de Louve, il avait encore du mal à penser comme eux.

Il congédia les deux membres de la meute d’un mot, et se leva pour faire face à son fils qui s’était mis à hurler. Il n’eut d’ailleurs pas le temps de lui demander ce qui se passait qu’un hurlement secoua la petite maison : Louve et Adana était de retour. Regardant avec fierté ses enfants, Tallagh s’agenouilla près de sa fille, qui lui demanda s’il venait avec eux accueillir leur mère. Prenant sa fille dans ses bras, le dragonnier la souleva de terre, tandis que l’enfant se serrait contre lui. Déposant un baiser sur les cheveux roux de la fillette, Tallagh demanda à son fils.

C’est toi qui l’as vu en premier, pas vrai ? Bravo ! Allez viens, on va aller l’accueillir tous les trois.

Il laissa le garçonnet le précédait, suivant d’un pas plus lent mais tout aussi impatient. Louve n’était pas partie bien longtemps, mais même quelques heures d’absence lui semblait une éternité. Tenant Zephril contre lui, le parjure descendit l’escalier et sortit de la maison où il assista, un main posé sur l’épaule de son fils qui l’avait attendu à la porte d’entrée, à l’arrivée de Louve, la mère de ses enfants, sa femme qu’il chérissait par-dessus tout.

[ Etant une flemmarde professionnelle, je mixe les deux posts ]

Le garçonnet était grimpé en haut a toute vitesse, et n'avait pas écouté l'avertissement de sa jumelle.
Peut être aurait-il dus, mais ce qui est fait est fait. Quìmari fixait d'un air vaguement inquiet les deux grands loups. Ses yeux couleur de sang brillaient comme des rubis, et il se dressait presque entre Teyn et les adultes, pour le protéger.
Mais Cœur de la Meute ne semblait pas particulièrement en colère de l'intrusion des jeunes. A vrai dire, il semblait même plutôt joyeux.
Et l'annonce que Regard de Lune arrivait sembla le rendre plus heureux encore.
Les enfants pouvaient constater chaque jour a quel point leurs parents s'aimaient, même s'ils n'étaient pas toujours d'accord. Papa avait laissé entendre que peu avant que Maman ne les mette au monde, il y avait eut de sérieuses anicroches.

Le hurlement de la belle dragonne blanche couvrit ses paroles, mais en gros, le petit garçon expliquait qu'il était parti se balader avec Valuk et Quìmari, et qu'il avait vu la silhouette d'Adana se détacher sur le ciel.
Les yeux d'or de Teyn scintillèrent de mécontentement pendant un instant. Lui aussi, il aurait voulu un câlin de Kel'nar !

Il surmonta son accès de mauvaise humeur et repartit presque en courant vers l'escalier, tout fier de passer devant. On ne se rendra jamais compte à quel point l'orgueil d'un enfant peut surpasser celui d'un adolescent....

[ Lexique :
Valuk = Roi
Kel'nar = Papa
Ilharn = Père ]

¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤

La plaine défilait sous les ailes d'albâtre du reptile géant. Les écailles de diamant de la dragonne renvoyaient la lumière du soleil, et ses yeux de cristal fouillaient du regard les moindres collines.
La crinière de cheveux noirs de sa cavalière claquait au vent, tache sombre sur la cape blanche. Sa peau presque translucide ne donnait pas l'impression de voir le soleil souvent, et son regard d'argent était plus doux que celui de l'écailleux.

¤ Tu n'as plus la taille de chasser le lapin Aldana ¤

La dragonne grogna bruyamment. Elle battit des ailes une fois et s'éleva au-dessus des nuages qui striait l'azur du ciel.

¤ Je cherchais une de ces délicieuses antilopes, ou un cheval ... ¤
¤ Pas touche aux chevaux. ¤
¤ Pourquoi est-ce que j'avais deviné que tu dirais ca ? ¤

La femme ne répondit rien et ferma les yeux, laissant le vent fouetter son visage aux traits délicats. Ses oreilles pointues apparaissaient parfois entre des mèches couleur de jais, dévoilant son appartenance_ en apparence tout au moins_ a la race des elfes.

Aldana plongea brutalement vers le sol, repliant ses larges ailes sur son corps gracieux malgré sa taille.

¤ Réveille-toi petite rêveuse ! N'oublie pas que tu es sur mon dos. ¤
¤ Je pensais aux enfants ... ¤
¤ Et à Tallagh bien sur ... ¤

Après un instant de silence, l'elfe tourna la tête vers sa compagne, posant une main gracile sur les immenses écailles d'ivoire.

¤ C'est si évident que ca ? ¤

Peu charitable, la créature mythique répondit calmement :

¤ A peu près comme la gueule au milieu de la figure ¤

La femme soupira et reposa son regard sur les plaines sans fin de Marna. Dés que son fiancé, devenue son époux, l'avait amené ici, elle était tombée sous le charme de ces plaines qui lui rappelaient celles de son enfance. Et le léger val ou était leur maison, était si beau qu'il était difficile de le croire vraie.
Elle avait vraiment hâte de rentrer.

¤ Louve, on arrive ¤

Inay sortit de sa rêverie et posa son regard couleur de lune sur la belle maison aux murs blancs. Sa maison...

La dragonne poussa un puissant hurlement, un cri qui retentit jusqu'au confins de la plaine.
Elles étaient de retour.

Cela allait faire presque deux semaines que la guerrière n'avait pu venir ici. Les petits seraient la, sûrement. Mais leur père ?

¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤

Teyn leva la tête vers le ciel, et montra du doigt la silhouette de la grande dragonne blanche.

" La ! "

Ses cheveux d'un roux intense flamboyaient à la lumière de l'astre diurne, et ses yeux scintillaient de l'or pur.

¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤

La dragonne poussa un autre cri, et un étrange sourire apparut sur son museau. Malgré ses dires, elle commençait à apprécier, un peu, le Parjure, et adorait littéralement les enfants.
Laissant ses larges ailes étendues, elle descendit jusqu'au sol en vol plané, et se posa un peu devant le jardin.
On put entendre les protestations outrées de la belle elfe qui souhaitait protéger ses plantations contre le vent soulevé par l'atterrissage d'Aldana.
La femme descendit d'un bond le long de l'épaule de sa compagne. La créature posa le bout de son museau dans le cou de sa dragonnière, mais n'insista pas trop pour avoir des papouilles.
Elle sentait l'impatience de la guerrière, qui souhaitait retrouver sa famille.

Se dégageant de la poigne de son père, Teyn partit au galop vers Maman. Quìmari courait à ses cotés, comme toujours.
Le petit garçon sauta littéralement dans les bras de sa mère qui le rattrapa en riant. Les yeux argentés d' I'ssuri pétillaient avec joie, et son rire cristallin confirmait cette impression.
Elle fit tournoyer Teyn un peu, le faisant rire aussi, avant de l'embrasser sur le front et de le poser sur sa hanche.
Son fils dans les bras, elle se dirigea calmement vers son mari et sa fille. Ses longs cheveux noirs retombaient dans son dos tel un voile, contrastant avec sa peau si pale.
La louve semblait vraiment heureuse...

[ Lexique :
I'ssuri = Maman
Ilhar = Mère ]

Zephril, un peu inquiète à l’idée d’être réprimandée, fut tout à fait rassurée quand son père la prit dans ses bras, et se blottit contre lui, serrant de toutes ses forces le cou de son père. Elle ne se sentait jamais aussi bien que là, sauf peut-être quand Teyn et elle étaient couchés et que leur père leur racontait une histoire, un bras passé autour de la taille de Maman. Peut-être ce soir ! Elle espérait de tout cœur qu’ils seraient tous là ce soir, et pour beaucoup d’autres soirs. Mais il fallait se concentrer sur l’instant présent, et pour l’instant, Maman était de retour !

La fillette détourna le regard pour regarder son frère, résistant à l’envie de lui tirer la langue. Il avait beau être le premier à toujours tout dire, cette fois, c’est elle qu’on portait, et pas lui ! Mais cette pensée lui quitta bien vite l’esprit tandis que son jumeau repartait en courant, suivi par leur père qui la serrait dans ses bras. Enfouissant son petit visage dans l’épaule du dragonnier, elle se laissa bercer par ses pas et murmura doucement.

Je t’aime Kel’nar

Les deux enfants utilisaient sans problème les trois langues qu’ils connaissaient, mais savaient que leur père avait une préférence pour le langage commun, aussi, s’efforçaient-ils de communiquer ainsi avec lui. Son père répondit par une caresse sur les cheveux, et Zephril releva la tête pour assister à l’arrivée de sa mère et d’Adana. Teyn, comme toujours, fut le premier à pointer du doigt la dragonne blanche, et Zephril leva les yeux pour regarder s’approcher la compagne de leur mère, qui descendit lentement et finit par se poser près du jardin.

Aussitôt, Teyn partit en courant vers elle, et Zephril vit, avec une pointe de jalousie vite oubliée, son jumeau sauter dans les bras de leur mère avec un cri de joie, un Quìmari sautillant à ses côtés. Tae, plus réservée, était restée sur le pas de la porte, regardant avec attention l'arrivée de son alpha et l'accueil des enfants.

Zephril sourit en entendant le rire de sa mère et de son frère, et se tortilla pour échapper aux bras de son père, qui la déposa par terre avec un sourire. La petite fille courut vers sa mère, le sourire aux lèvres, et entoura Louve de ses bras, forçant presque la jeune femme à s’agenouiller pour éviter de tomber. Ses yeux bleus pleins d’amour, Zephril sortit de la poche de son pantalon un bouquet de marguerites à moitié écrasé, et le tendit triomphalement à sa mère.

C’est pour toi, I’ssuri. Pour mettre dans le vase qu’on a fait, Teyn et moi, avant que tu t’en ailles.

Bien sur, le bouquet n’avait pas fière allure, mais la petite était si contente qu’elle se le représentait comme étant le plus beau cadeau du monde. Serrant de ses petits poings les vêtements de sa mère, elle eut un large sourire avant de retourner se blottir dans les bras de son père, qui les avait rejoint.

[Toi ? Flemmarde ? J’avais pas remarqué Xd]

Tallagh regardait avec orgueil son fils dévaler les escaliers, suivant à une allure plus modérée. Le petit avait toujours été le plus observateur et était ravi de jouer les guetteurs. Un bon soldat en perspective… mais il était encore bien trop tôt pour songer à ça. Les deux enfants avaient un potentiel exceptionnel, c’était vrai, mais pour l’instant, l’important était qu’ils grandissent le plus sereinement possible et, malgré les absences plus ou moins prolongées de leurs parents, cela avait l’air de bien marcher jusqu’à maintenant.

Tallagh espérait vraiment que Louve allait rester un peu. Elle était partie depuis deux semaines, et juste avant, ça avait été à son tour de s’absenter. Résultat, ces deux derniers mois, les deux jeunes gens n’avaient pas du rester ensemble plus d’une dizaines de jours. Mais là, Tallagh avait décroché une permission et il avait deux longues semaines à passer aux côtés de sa famille. C’était un peu bête à dire, mais depuis quelques jours, il savourait le fait de se lever avec les enfants, de les faire déjeuner, de leur faire apprendre leur leçon et de passer la journée à participer à leurs jeux. Il appréciait, même si… il aurait bien aimé que Louve soit là.

Zephril le sortit de sa rêverie en lui murmurait qu’elle l’aimait, et le dragonnier sourit largement en embrassant sa petite princesse avant de la serrer plus fort contre lui. Sa petite princesse… Tallagh n’avait pas de préféré parmi ses deux enfants, il était aussi fou de l’un que de l’autre, mais différemment. Zephril était sa petite fille, qu’il s’efforçait de protéger, à qui il aimait raconter des histoires et dont il appréciait les câlins. Teyn était un petit chenapan, et tous les deux partageaient des choses de garçons : la pêche, la chasse… bien que jouant les petits dur, il appréciait autant les câlins que sa sœur.

Tallagh arriva sur le perron, et, la main posée sur l’épaule de Teyn, observa l’arrivée de Louve, souriant de plus belle quand celle-ci protesta devant le danger couru par son jardin. Mais Adana avait fait attention de ne pas tout saccager, et le jeune homme lui en fut reconnaissant. Ca lui éviterait de passer la journée de demain à bêcher et à replanter, et il avait des choses bien plus importantes à faire… la dragonne blanche semblait lui en vouloir un peu moins, depuis leur différent d’il y a pas mal de temps. L’arrivée des enfants, le mariage ? Tallagh ne savait pas, mais il était heureux de ne pas imposer à sa femme des disputes incessantes et, pour cela, il respectait la belle dragonne.

Teyn s’échappa pour courir vers sa mère, et le Parjure observa avec bonheur les retrouvailles de sa femme et de son fils. Zephril s’agita à son tour, et il la laissa courir vers sa mère, regardant ce tableau merveilleux avec un regard presque émerveillé. Si le temps aurait pu s’arrêter pour toujours, il aurait voulu que ce soit là. Sa femme, ses enfants, les êtres qu’il chérissait le plus réunis, heureux. Seul Tal’ était absent, mais le grand dragon vert avait avertit son dragonnier qu’il le laissait à la joie des retrouvailles.

Tallagh finit par s’avancer vers sa femme, tout en la dévorant du regard. Il était plus amoureux que jamais, son attitude ne laissait passer aucun doute. Il adorait ses enfants, bien sur, mais chérissait sa femme d’autant plus. Se penchant pour reprendre Zephril dans ses bras, il s’approcha d’un pas mesuré et s’arrêta en face de Louve, ses yeux verts se repaissant de la beauté de sa jolie femme. Se penchant vers elle, il posa son front contre celui de Louve et, la dévisageant avec un sourire, finit par l’embrasser.

Longuement, doucement : ce baiser était un moment rien qu’à eux. Oubliés les enfants, oubliée Adana qui les observait : Tallagh venait de retrouver sa femme, et il était le plus heureux des hommes. A regret, les lèvres du dragonnier quittèrent celle de la jeune femme et, plongeant ses yeux dans les siens, il lui caressa la joue de sa main libre.

Usstan lle'warin dos, ssinjin xukuth
Tu m’as manqué, mon cœur

Ses doigts quittèrent la peau veloutée de son amour, et il ébouriffa les cheveux de Zephril qui les regardait. Les enfants savaient que leurs parents s’aimaient, même s’ils ne se voyaient pas souvent, et qu’il leur semblait assez étrange de ne pas trop parler de leur père en présence des amis de Maman. Enfin, sauf de Tante Maryn et de Malkiel, qui venaient parfois à la maison.

Le parjure regarda sa femme avec amour, avant de se tourner vers Adana et de la saluer d’un signe de tête. Histoire de préserver leur entente mutuelle, il se devait bien de se montrer amical, même s’ils avaient un passé plutôt conflictuel. Détournant le regard, il se glissa à côté de Louve et, l’enlaçant de sa main libre, l’embrassa à nouveau.

Le petit garçon serra ses bras autour du cou mince de sa mère. Maman manquait toujours beaucoup aux jumeaux lorsqu'elle partait, Papa aussi. Enfin, elle ne manquait pas QUE aux enfants, n'est ce pas Tallagh ? xD

La femme le serra dans ses bras avant de s'accroupir pour câliner sa fille. Un sourire joyeux apparut sur ses lèvres devant le bouquet de fleurs. Ses yeux pétillèrent alors qu'elle embrassait le front de Zéphril.

" Très jolies ma puce "

L'elfe serra un instant la fillette dans ses bras, avant de la laisser repartir vers l'homme qui attendait un peu plus loin. Louve planta son regard d’argent sur l’humain qui avançait vers elle. Elle ne se départit pas de son sourire.
O Dieux ! Comme elle l’aimait cet homme !
Si on lui avait demandé de choisir entre Tallagh et un retour chez elle, parmi les siens, elle n’aurait pas hésité… Et aurait choisi de rester auprès de Son Tallagh. Oui, le sien. Parce qu’il était hors de question de laisser une autre femme mettre les pattes dessus, nan mais !
Bon d’accord, elle était peut être un petit peu jalouse. Mais il faut la comprendre. Cette jeune personne a la mentalité d’une louve, et chez les loups, les couples sont pour la vie. Cependant, elle ne perdait pas de vue que son époux était un humain, éventuellement plus porté à l’infidélité. Elle s’efforçait simplement de lui épargner toutes tentations.. ( On devrait lui décerner une médaille tiens )

Enfin bref, la demoiselle était vraiment heureuse de revoir son compagnon en pleine forme. Pour une fois qu’ils étaient ensemble sans que l’un d’entre eux n’ait une tête de mort-vivant fraîchement déterré … Euh non, ca c’était avant. Maintenant ils étaient en pleine forme lorsqu’ils étaient ensemble. Fatigués souvent, leurs ‘vacances’ auprès des enfants chez eux leur rendaient du poil de la bête.

Mais revenons à leur retrouvaille.
La femme sourit encore, croisant le regard vert de son dragonnier de mari. De son bras libre, elle enlaça la nuque de son homme avant de poser doucement son front contre le sien. Les longs cheveux noirs de la dragonnière masquèrent leur visage quelques instants. Le temps pour Tallagh de l’embrasser, et elle d’y répondre tendrement.

« Dos mziln ussta Ssinssrigg...»
+ Toi aussi mon Amour…

Louve remonta un peu Teyn qui commençait à descendre le long de sa hanche, alors qu’elle préférait le garder dans ses bras. Egalement parce que le petit garçon l’étranglait en glissant xD
La ‘jeune’ elfe se blottit contre son aimé. Elle aurait bien niché sa tête dans son cou, mais il l’embrassa avant. Pas que ca la dérange vraiment, mais même si elle était aussi forte qu’un homme, elle aimait bien se sentir protégée, elle aussi.
Ca doit être un caprice commun a toutes les filles… Vive les câlins !
Enfin, avec les enfants dans les bras, c’était un petit peu plus compliqué pour ca, alors un baiser, c’est très bien aussi.

La belle dragonne blanche regarda le couple de ses yeux de cristal. A vrai dire, elle était impressionnée par l’affection qu’il existait entre deux êtres aussi différents. Ne serait-ce que sur le plan physique. Tallagh avait la peau mate, et des cheveux presque roux. Ses yeux couleur émeraude scintillaient dans un visage jeune et ouvert, et, à vrai dire, il faisait presque penser à un être flamboyant, un elfe peut être. Un chien-loup, voilà. Il lui faisait penser à un chien-loup, un mélange des deux espèces ne gardant que leurs qualités.
Louve, avait de longs cheveux plus noirs que la nuit, et une peau très pâle, presque translucide. Ses yeux couleur d’argent ne faisaient pas grand chose pour apporter une touche de chaleur au tableau.
Niveau caractère… Tallagh était plus confiant, plus ouvert et moins sauvage que sa compagne. Mais ils avaient aussi mauvais caractère l’un que l’autre, et n’aimait pas recevoir des ordres.
Le regard d’Adana se posa ensuite sur les enfants. Physiquement, ils ressemblaient beaucoup a leur père. Mais le petit Teyn semblait déjà montrer les prémices du caractère des loups, comme sa mère. Pauvre, pauvre Tallagh.

La femme mit fin au baiser en se blottissant contre le dragonnier, l’air d’une louve sauvageonne. Bah ! , s’en était une, pensa l’écailleuse couleur d’albâtre. La créature salua le jeune homme à son tour puis recula et s’envola dans le ciel d’azur, afin de laisser la petite famille tranquille.
Un noyau de paix et de bonheur dans une vie de guerre. D’une certaine façon, ils avaient beaucoup de chance de s’être rencontrés.

Le jeune couple et leurs enfants, toujours enlacés, se dirigèrent vers la maison. Heureux.
Ils s’aimaient, et cela leur suffisait.

Zephril avait été cueillir ses fleurs en espérant que sa mère ne tarderai pas, et elle avait vu juste. Toute heureuse devant le compliment de sa Maman, l’enfant se blottit volontiers contre elle, savourant son odeur en glissant sa petite frimousse dans les vêtements de la jeune femme. Elle leur avait manqué, à tous, et la petite affichait un large sourire en se serrant contre Louve, sourire un peu caché parmi l’ample tenue de vol de la dragonnière, mais dont on devinait aisément l’ampleur. Elle accueilli avec un sourire encore plus éclatant le baiser de sa mère et, sur un dernier câlin, s’éclipsa pour se jeter dans les bras de son père.

Tallagh attrapa sa fille et la souleva de terre, plantant un baiser sur le petit nez de l’enfant avant qu’elle ne se blottisse contre lui. Zephril regardait sa Maman, et dans ses yeux se lisait toute l’admiration qu’elle éprouvait pour elle… qu’est-ce qu’elle était belle, Maman ! Nulle autre femme ne lui arrivait à la cheville, ça, la petite en était convaincue. Même la reine Arya, que les elfes clamaient la plus belle du royaume, ne pouvait égaler la splendeur de sa mère. Et Zephril était prête à en découdre avec n’importe qui lui affirmerait le contraire. Enfin, quand elle aurait le droit d’avoir une vraie épée, et aussi, quand elle saurait la manier. Mais en attendant, Tae était là pour la seconder, tout comme Teyn et Quìmari, elle en était sûre.

Mais ce n’était pas le moment de penser à ça. Zephril cligna des yeux pour éviter le soleil, et fis un discret signe de main à Adana, la dragonne blanche qui, même si elle ne l’avouerait certainement pas, l’impressionnait un peu. Mais elle oublia bien vite la dragonne et regarda son frère, tout en posant sa tête sur l’épaule de son père. Elle pouvait presque mettre des mots sur les pensées qui agitaient l’esprit de son jumeau, tant elle le connaissait bien : lui aussi était ravi de revoir Maman, et devait brûler de lui raconter ses derniers exploits. Ah, ces garçons…

Elle aussi, elle voulait mettre I’ssuri au courant de tout ce qui s’était passé à la maison pendant son absence. Que dirait-elle quand elle saurait que la tarte aux mûres, dont quelques bouts avaient échappés à la gourmandise des enfants _et de leur père _, était son œuvre ? Enfin, Papa avait préparé la pâte, et elle n’avait fait qu’y mettre les fruits, n’empêche, ça restait SA tarte. Même Tallagh en concédait, la preuve, elle avait eu le droit au premier bout. Elle se languissait que Maman y goûte, juste pour voir un doux sourire s’épanouir sur les lèvres de sa mère, ce doux sourire qu’elle aimait tant et que Louve n’accordait qu’à ses enfants… et à son mari.

Quand Adana s’évanouit, la fillette glissa ses bras nus autour du coup de son père, l’embrassa sur la joue et glissa sa tête sur l’épaule du dragonnier, les cheveux roux de l’enfant se mêlant à ceux, plus foncés, de son père. Son père qui n’avait pas lâché la taille de Louve, remarqua d’ailleurs Zephril avec un sourire. Elle avait beau être petite, cela ne signifiait pas qu’elle était idiote : dès que son frère et elle seraient couchés, ils allaient se faire des câlins, elle en était sure. Dans sa tête de fillette de 6 ans, cela n’allait pas plus loin que des bisous et des câlins, serrés l’un contre l’autre, mais tout de même, elle trouvait ça assez romantique. Comme dans les histoires dont ses parents la régalaient avant qu’ils ne partent se coucher, elle et son frère… Tiens d’ailleurs, en parlant d’histoires, elle espérait que Maman et Papa consentiraient à lui lire sa préférée, ce soir. Elle aimait bien quand ils lisaient cette histoire, parce qu’en général, cela signifiait que tout le monde était là, auprès d’elle, et rien ne la réjouissait autant.

D’ailleurs, quand ils franchirent la porte, elle haussa la voix pour poser la question qui lui tenait à cœur.

C’est toi qui lira l’histoire ce soir, I’ssuri ?
++Maman++

Ses yeux bleus s’attachèrent à ceux de sa mère, sa petite mine adorable pleine de confiance muette.

A mille lieux d’imaginer tout ce qui traversait la tête de la dragonne d’albâtre, ou même celle de sa magnifique femme, Tallagh n’avait d’yeux que pour Louve, savourant avec bonheur la chaleur de son souffle et la douceur de sa peau contre la sienne. La petite tête de Zephril posée sur son épaule, la chevelure de l’enfant lui chatouillant parfois le nez, rien n’empêcha Tallagh de serrer sa femme contre lui. Chose assez malaisé en regard des jumeaux qui s’accrochaient fermement aux bras de leurs parents, mais il avait l’habitude. Les enfants étaient encore petits et il adorait ces moments à quatre, ces moments où rien n’importait, si ce n’est l’amour qu’il éprouvait pour sa petite famille.

Ils se dirigèrent doucement vers la maison, sans que le dragonnier ne consente à lâcher sa femme, qu’il tenait toujours serrée contre lui, Zephril accrochée à son cou. Il faudrait changer de méthode quand ils auraient grandis mais, pour l’instant, les deux bouts de chou n’étaient pas très lourds. Remontant l’allée aux pierres blanches, le jeune couple s’avança vers la porte, que Tallagh avait laissée grande ouverte, et ils s’engouffrèrent dans la fraîcheur de la maison. Nul bruit ne retentissait, hormis le chant des oiseaux et quelques appels des cheveux qui paissaient un peu plus loin.

C’était pour ça que Tallagh avait eu l’idée d’offrir cette demeure à Louve. Une maison loin de tout, éloignée de tout ce qui se rapprochait de près ou de loin à leurs obligations respectives. Un lieu parfait pour élever les jumeaux sans les exposer au danger inhérent à la vie de leurs parents. D’ailleurs, les convictions de chacun étaient un sujet tabou entre Louve et son mari. Ils se respectaient, et aucun n’avait l’intention de faire changer l’autre d’avis, bien qu’ils aient, au début, essayé.

Ce jour là, Louve avait si bien exposé sa haine de Galbatorix à son parjure de mari qu’il lui avait promis de ne plus en parler. Mais il n’empêche, elle demeurait sa femme et Tallagh voulait seulement s’assurer de son bien être, sans penser à mal. Il allait donc lui demander si elle avait fait bon voyage quand Zephril le devança en demandant si, ce soir, Louve lui lirait une histoire.

C’était plus ou moins devenu un rituel : quand leurs deux parents étaient présents, les jumeaux ne s’endormaient pas sans un conte et une armée de baisers. Tallagh s’en chargeait la plupart du temps, il aimait bien raconter les anecdotes d’Ûru’Baen, les légendes et les exploits chevaleresques de héros plus ou moins réels. D’habitude, il s’asseyait dans la chambre et, sa douce épouse blottie contre lui, partageait avec ses enfants les aventures de ceux qui avaient marqué l’Histoire. Chevaliers, dragonniers, paysans devenus généraux… tout était accueilli avec des cris de joie, et le Parjure racontait sans se lasser. Mais ce soir, Zephril désirait une histoire racontée par Louve, et l’idée ne déplaisait pas au jeune homme. Du moment qu’il pouvait se glisser contre sa compagne durant cette lecture, et ensuite lui montrer, quand les enfants dormiraient à poings fermés, à quel point elle lui avait manqué…

Ce que Zephril essaye de te dire, c’est que je lis très mal les histoires de princesses.

Répliqua le dragonnier en ébouriffant les cheveux de sa fille. Il avait commencé à lire les aventures de Selyne, une petite camérière devenu dragonnière, et qui avait ensuite épousée un prince d’au-delà des mers. Un conte fort répandu en ce moment dans l’Alagaësia, et dont Tallagh savait qu’il charmerait la petite rouquine. Mais, aux dires de celle-ci, il n’arrivait pas à bien décrire comment étais la princesse et son prince charmant et, bien que Teyn lui eu rétorqué qu’il s’en fichait, du moment qu’elle savait bien monter sur son dragon, la petite n’en démordait pas. Et à la limite, que Louve soit chargée de l’histoire ne lui déplaisait pas plus que ça.

Le jeune Parjure était heureux de revoir sa bien-aimée, mais il savait que ces retrouvailles seraient de courte durée. Avant son départ, le Roi lui avait bien précisé qu’il devrait être de retour dans un mois, pour assister au conseil. Ce qui laissait au dragonnier un peu moins de deux semaines maintenant, avant de reprendre la route pour Ûru’Baen. Louve n’en serait pas heureuse, il en était sur, et se résolut de tenir sa langue pendant un petit moment. Elle l’apprendrait bien assez tôt, et il ne voulait pas gâcher ce moment de bonheur par des pensées terre-à-terre. Se rapprochant de sa femme, il glissa sa main dans les cheveux de son fils, qu’elle portait toujours dans ses bras, et indiqua avec un sourire.

Il y a une surprise pour toi. Bon, j’avoue qu’à nous trois, on en a déjà mangé une bonne partie, mais il reste une petite part de tarte. Les enfants ont cueillis eux-mêmes les fruits.

Il désigna la tarte, ou ce qu’il en restait, qui trônait sur la table. Le mobilier de la maison était plutôt modeste et, étant donné que leur secret devait à tout prix être protégé, le jeune couple n’avait engagé ni serviteur, ni cuisinier. Malgré ce qu’il affirmait au début, Tallagh se débrouillait pas mal en cuisine et, de toute façon, il n’avait pas le choix quand Louve était absente, les jumeaux devaient bien manger. Et il fallait avouer qu’il n’était pas un si mauvais cuistot qu’il voulait le faire croire.

( Cadeau pour Zephril ^^ ->> )

Le petit garçon resserra son étreinte sur le cou de sa mère. Il n'avait pas l'intention de la lâcher avant un moment !
Ses yeux dorés étaient mis-clos, et il ronronnait presque, collé à I'ssuri. Sa tignasse chatouillait un peu le menton de Louve, alors qu'elle le serrait contre elle. Teyn devinait que ce soir, Zephril et Maman allaient encore passer des heures dans la salle de bains. Elles interdisaient toujours à Papa et lui de venir, prétextant que c'était des 'trucs de filles'.
N'empêche .... Il aurait bien aimé savoir ce qu'elles faisaient.
L'enfant espérait que sa sœur n'avait pas le droit à un supplément d'histoires et qu'elle ne lui disait rien, ce serait vraiment injuste ! N'empêche, pendant que les filles jouaient avec l'eau, lui il pouvait faire des trucs avec Papa. Et même qu'une fois il était monté sur le dos de Talenka ! Mais il n'avait pas eu le droit de voler tout seul, c'était pas marrant. Mais aussi, des fois Papa se transformait juste devant lui !
Papa et Maman pouvaient se transformer en loups, et Teyn s'imaginait qu'ils allaient chasser ensemble la nuit, parfois. Maman était une très grande louve très noire, avec des yeux argentés, mais Papa était un loup gris fauve, avec les yeux verts. Teyn aimait bien s'enfouir dans la fourrure de Papa, même que des fois il s'endormait pendant que Zephril essayait de démêler la queue de Kel'nar. Les filles étaient bizarres. Même s'ils étaient extraordinairement proches, même pour des jumeaux, Teyn avait parfois du mal à comprendre ce qu'il se passait dans la tête de sa sœur. Il avait toujours mis ca sur le compte de son appartenance au sexe féminin.

Enfin, l’enfant arrêta de réfléchir dans tous les sens, et se concentra sur la question de sa sœur, et ce qu’ajouta Papa. Zephril voulait que ce soit Maman qui lisent l’histoire ce soir. Papa lisait très bien les récits de batailles, mais il avait toujours une drôle d’ombre dans les yeux quand il racontait ca. Comme si ca le rendait très triste, ou qu’il vivait de mauvais souvenirs.
Peut être que des gens qu’il aimait avaient été morts dans une bataille contre les méchants que Maman et lui combattais… Enfin, le petit garçon ne le saurait probablement jamais, et ce n’était pas plus mal.
Mais il était d’accord avec sa jumelle …. Papa décrivait très mal les personnages.

« Papa il sait pas décrire Selyne comme Zephril voudrait » expliqua-joyeusement le gamin aux cheveux flamboyants.
Il déposa un bisou sur la joue de Maman. Si c’était elle qui racontait, c’était Papa qui chantait la berceuse. A part quand ils étaient bébés, les petits n’avaient jamais entendu Papa chanter, et il était curieux. Kel’nar ne pouvait pas chanter aussi mal qu’il le décrivait, c’était impossible.

« Et pis, la tarte de Zephril elle est giga bonne ! »

Teyn tourna la tête lorsqu’ils entrèrent dans la maison. Les deux adultes se dirigèrent vers la cuisine, là où se trouvait le plat de sa sœur. Mais quelque chose d’autre attira son regard.
Là, derrière la table, il y avait une silhouette inconnue. Se déconcentrant de sa famille, il fixa son attention sur cette forme qui bougeait dans l’ombre. La forme avança et il croisa un regard aussi doré que le sien. Le pelage de la louve semblait s’enflammer à la lumière du soleil qui passait par la fenêtre. Ses crocs brillaient comme du diamant, et ses douces oreilles pelucheuses étaient tournées vers le jeune couple. Elle roula sa langue en mirliton, ce qui était le rire chez les loups, Teyn le savait. La louve regarda les enfants, puis ses yeux se posèrent sur Tallagh. Sa voix résonna dans la tête de toutes les personnes présentes.

¤ Alors, c’est lui mon gendre ? Félicitations… ¤

Teyn sentit Maman qui se raidissait brutalement, en ouvrant de grands yeux, alors que la louve se transformait en une très belle femme aux cheveux roux et aux yeux d’or, qui les fixait avec une expression malicieuse et amusée propre aux loups.
Une femme que Tallagh avait déjà vu une fois, dans la mémoire de son épouse.

Poldenra….

[ La suite demain dans le mess de Louve, niark xD ]

La femme se blottit contre son Parjure d'époux. Quel long chemin ils avaient parcouru depuis le combat contre les Ra’Zacs à Urû'Baen ! Il y avait eu des hauts et des bas, tout n'avait pas toujours très bien fonctionner. Louve et Tallagh avaient un foutu caractère les deux, ce qui impliquait quelques étincelles, mais ils s'aimaient trop pour qu'une dispute dure bien longtemps.
L’elfe sourit quand son fils embrassa sa joue, et elle le serra un peu plus contre elle. Elle ne préférait aucun de ses enfants, et les aimaient autant l’un que l’autre. Mais Zephril était sa fille, ce qui impliquait un lien différent de celui qu’elle avait avec Teyn. Pour le moment, ca ne changeait rien, mais plus tard… Si la petite devenait mère à son tour par exemple, mais on en est pas encore là.
Louve baissa un peu la tête et frotta tendrement son nez contre celui de l’enfant. Elle eut le droit à un supplément d’informations par son fils et son mari, ce qui la fit sourire doucement.

« C’est Papa qui chante alors ? »

La coutume voulait que Maman leur chante une berceuse dans sa langue à elle, la langue qu’elle parlait quand elle était petite. La dragonnière n’avait jamais parlé de son enfance, à personne. Ni Tallagh ni Adana ne savaient ce qu’elle était, ni qui elle était, avant qu’un certain hrulga décide de la parachuter ici, en Alagaësia. Enfin bref, la jeune femme était tout à fait d’accord pour que ce soit Tallagh qui chante. Elle avait constaté qu’il ne chantait pas aussi mal qu’il le disait, et avait envie de l’entendre Lui.

Par contre, au grand damne de l’elfe, elle avait découvert que son mari savait très bien cuisiner, l’empêchant de sortir sa réplique favorite : « C’est toi qui as fait ca à des aliments au départ parfaitement comestibles !? »
Une chose qu’elle entendait assez souvent dans la bouche d’une de ses mères adoptives.

« Giga ? C’est quoi ca ? » Demanda t’elle avec un petit rire. « Mais je suis curieuse de goûter ca ^__________^ » ajouta la jeune mère.
Ses longs cheveux noirs cascadaient sur l’épaule de son Parjure attitré, alors qu’elle fermait doucement les yeux. Le soleil qui entrait par la fenêtre réchauffait l’atmosphère de la pièce, et éclairait agréablement la cuisine.

Brusquement, l’elfe se raidit. Elle venait de sentir une présence peu habituelle… Une présence qui n’avait rien à faire là. La dragonnière rouvrit les yeux et fixa ce petit coin de la cuisine, où venait d’apparaître une grande louve au pelage roux.
Une louve qu’elle connaissait, et qu’elle ne connaissait pas en même temps.
Louve planta ses ongles dans le bras de son pauvre époux, et fixa en silence le fauve. En silence, car aucun son ne voulut franchir la barrière de ses lèvres. Ses yeux, argentés au contraire de ceux dorés de la louve, s’étaient nettement arrondis et elle semblait un peu en état de choc.

¤ Alors c’est lui mon gendre ? Félicitations … ¤

La femme avait l’impression que tous l’air avait été chassé de ses poumons, et qu’une boule géante lui comprimait le ventre. Un frisson courut le long de sa colonne vertébrale, sans lui tirer aucune réaction. Elle n’aurait pas réagit différemment si on lui avait jeté un seau d’eau froide sur la tête.

La louve se transforma, et devint une femme aux cheveux aussi roux que son pelage, et aux yeux d’or perçants. Son visage ressemblait terriblement à celui de Louve, à celui de sa fille.
Cette femme, pendant quarante ans, elle l’avait cru morte. Pendant quarante ans, elle avait cru être orpheline. Il y a moins de six ans, elle avait même revu la mort de cette femme, avec Tallagh.
Poldenra, car tel était son nom, braqua sur la dragonnière un regard qui semblait lire dans les âmes. Un regard couleur d’ambre, qui brisait tous les secrets, qui comprenait chaque geste, qui n’acceptait aucune barrière. Sa voix résonna une nouvelle fois, étrangement, un peu plus triste, mais uniquement dans l’esprit du Parjure et de sa compagne. Ils étaient les seuls à savoir qu’elle était sensée être morte, les jumeaux l’ignoraient. Ils avaient droit à une explication.

¤ Les loups vivent le temps qu’ils ont décidé de vivre… ¤

[ Je suis vraiment désolée ^^’, j’adore faire des citations de ce bouquin. ]

Le regard de la femme était toujours aussi clair. Calme et empli de sagesse serait juste également. Yeux dans les yeux, la mère et la fille se disputaient par la seule force de leur regard.

« Inay … »

Louve se recroquevilla contre Tallagh, comme si Poldenra venait de la frapper. La femme aux cheveux couleur de flamme en sembla peinée, mais ne dit rien de plus.

« Amil … » sortit doucement des lèvres de la dragonnière, si bas qu’il est difficile de croire que quiconque l’ait entendue.

[ Amil = Mère
^________^
Dico’ ^^
Tu peux jouer Poldenra aussi si tu veux.
Tu as passé de bonnes vacances ?
J'ai Mon Breveeeeet nyaaa
J'vais me taire ^^ ]

Papa ébouriffa ses cheveux, et la petite se laissa faire, nichée contre lui, ses yeux grands ouverts ne quittant Maman que pour regarder Teyn, collée à elle. Il lui tardait elle aussi de se serrer contre sa mère, mais pour l’instant, elle était bien là, presque bercée par le pas du dragonnier qui la tenait contre lui, la laissant entourer son cou de ses petits bras. De toute façon, ce soir, elle aurait I’ssuri rien que pour elle, et elles pourraient parler de tous pleins de choses qui, elle le savait, n’intéressait pas le moins du monde les garçons.

En tout cas, son frère était tout à fait d’accord avec elle en ce qui concernait les histoires : Papa avait beau faire vivre les batailles, vous y transporter comme si vous y étiez, les personnages, ce n’était pas son fort. Maman était bien plus douée pour ça, elle faisait vivre les héros comme si elle les connaissait vraiment. Peut-être était-ce le cas, qui sait ? Enfin, peut-être pas. Selyne était née il y a très très très longtemps, et Maman n’était même pas encore dans le ventre de sa propre maman à l’époque.

Leur grand-mère… Zephril ne la connaissait pas. Mais elle savait qu’elle existait, ou qu’elle avait existé, du moins. Sinon, comment Maman serait venu au monde ? En tout cas, personne n’en parlait jamais. Même Kel’nar ne s’appesantissait pas sur ses propres parents qui, d’après ce que Zephril avait compris, n’étaient pas des gens très gentils. Pas du tout comme Maman et Papa. Et de ce fait, elle n’avait aucune envie de les rencontrer… mais la maman de Maman, c’était une autre histoire. Elle avait l’air gentille, elle, pas du tout comme la maman de Papa.

Mais la fillette oublia toutes ces idées compliquées en entendant le compliment de Teyn. Rougissant jusqu’aux oreilles, ses joues semblant rivaliser avec le feu de sa chevelure, elle plaqua ses deux mains sur son visage pour en cacher la teinte écarlate. Oh, qu’est-ce qu’elle l’aimait, son frère ! Il était si gentil, si adorable, et tellement beau. Pour un peu, elle l’aurait embrassé, mais se contenta de lui faire comprendre, dans leur langage à eux, qu’elle appréciait le compliment, et qu’elle le remerciait de tout son cœur.

Mais curieusement, personne ne fit de remarque. La petite se déhancha, cherchant à comprendre pourquoi l’atmosphère, si guillerette quelques secondes auparavant, venait brusquement de se refroidir. Elle n’attendit pas longtemps, remarquant une silhouette qui, elle s’en doutait, n’était pas à sa place ici. Mais rien ne pouvait leur arriver, à son frère et elle, dans les bras de leurs parents, et c’est plus avec curiosité que frayeur qu’elle observa attentivement le nouvel arrivant. Enfin, la nouvelle arrivante, puisqu’il s’avérait que c’était une louve.

La petite la dévisagea attentivement, serrant son poing. La nouvelle ne faisait pas partie de la Meute, elle le savait, et pourtant, son regard lui était étrangement familier. Les yeux dorés de la louve croisèrent les siens, et Zephril remarqua alors qu’elle riait. Curieux, qu’est-ce qui était drôle ? Tout le monde avait l’air tendu, ce n’était pas très marrant. Jetant un regard interrogateur à Teyn, elle reporta rapidement son attention sur la louve, dont la voix venait de s’insinuer dans son esprit. Chose curieuse, mais pas tant que ça… c’était plutôt la suite qui était extraordinaire.

Maman s’était raidi, comme si elle était surprise, mais Zephril n’eut pas le temps de se demander ce que signifiait la réplique de la louve que celle-ci se changea en une très jolie dame rousse, aux yeux aussi dorés que ceux de Teyn… aux cheveux aussi roux que ceux des jumeaux… Et puis gendre, cela voulait bien dire…

I’ssuri ?

Demanda la petite, la voix rendue aiguë par l’inquiétude. Elle avait beau savoir qu’elle ne risquait rien, l’attitude de Maman, et de Papa, avait de quoi la dérouter. Il se passait quelque chose, mais elle n’y comprenait rien. Un brin alarmé, elle s’accrocha plus fort au cou de son père, posant ses yeux d’un bleu limpide sur sa mère qui, après être demeurée immobile, se rapprocha plus près de Kel’nar.

Décidément, il se passait quelque chose de très étrange, et la petite refoula ses larmes. Elle avait envie de pleurer, mais non, elle ne le ferait pas devant cette dame ! Elle était Zephril Lame-d’Acier, et pas une vulgaire gamine ! N’empêche, la situation avait de quoi être terrifiante, et ni Maman, ni Papa ne bougeait.

Au fond d’elle, Zephril savait pourtant qui était l’inconnue. Elle ressemblait trop à Maman, trop à Teyn, trop à elle-même pour que la petite fille ne sache à qui elle avait à faire. Prenant son courage à deux mains, elle finit par se résoudre à briser le silence qui s’était installé, depuis que la femme avait prononcé le nom de Maman. Qu’est-ce qu’elle leur avait fait, à tous, pour qu’ils soient si impressionnés ?

Qui tu es ?

Derrière cette question anodine s’en cachait des milliers d’autres, mais aucune n’avaient pu franchir l’esprit embrouillé de l’enfant. Elle se contenta de plonger ses yeux dans les yeux d’or de la femme qui lui faisait face, cette grand-mère dont elle commençait à penser que l’existence n’était qu’une légende, sans lâcher le cou de son père qu’elle serait inconsciemment un peu plus fort.

[C'est bête, mais je suis assez fier de moi ce coup-là, je le trouve pas mal du tout mon post.
Mais non, je ne me la pête pas! Xd]

Teyn abonda dans le sens de sa sœur, à savoir que lui, Tallagh, ne savait pas lire les histoires. Où, pour être plus précis, ne savait pas décrire les personnages aussi bien que ses enfants le désiraient. Le dragonnier devait l’avouer, les princesses et les héros, il avait un peu de mal à les faire devenir réel. Quand aux batailles… ce n’était pas la même chose. Il en parlait d’un ton captivé, entraînant avec lui ses auditeurs. Mais il ne pouvait s’empêcher de songer, en narrant ces récits où seuls les méchants mourraient, où toujours le bien triomphait, que dans la réalité, ce n’était pas comme ça. A chaque mort, chaque blessure, il se rappelait des horreurs qu’il avait vu, certaines qu’il avait commise lui-même. S’il existait un Dieu, une puissance divine, quelque chose, n’importe quoi, qui protégeait les habitants de cette Terre, il le priait chaque jours de ne pas faire connaître ce malheur à ses enfants. La Guerre… boucherie, acte barbare, et que pourtant les êtres vivants se plaisent à créer et à faire. Enfin… il ne lui appartenait pas de juger les guerres, et leurs instigateurs, mais si seulement il pouvait éviter cela à ses enfants, il se considérerait comme le plus chanceux des hommes.

Mais c’était aujourd’hui jour de fête, sa femme était rentrée, ils pouvaient enfin se comporter comme une famille, et le Parjure s’efforça de chasser ces pensées négatives de son esprit. La proposition de Louve, faisant de lui le chanteur de la berceuse, lui arracha une exclamation indignée.

Vous aviez manigancé ça avant, ou quoi ? Hors de question que je tombe dans le piège, petits monstres !

Clama-t-il à ses enfants en ébouriffant avec un sourire la chevelure de son fils. Il ne se doutait pas d’être au pied du mur, et malgré son refus obstiné, les trois affreux qu’il avait devant les yeux saurait bien l’y convaincre. Pas qu’il ne chanta horriblement mal, non, tout simplement… il préférait entendre sa femme. Même s’il ne comprenait pas les paroles, la douce voix de sa belle lui remuait le cœur à chaque fois, et il adorait l’écouter. Et puis, c’est vrai, il n’aimait pas chanter. Contrairement à ce que pensait sa femme, il n’aimait pas du tout faire entendre sa voix, qu’il considérait comme l’antithèse de l’harmonie. Mais si ses trois amours insistaient, il ne pourrait pas refuser : tout le monde, dans la pièce, en était bien conscient.

Ses protestations véhémentes étaient donc de pure forme, mais il n’allait pas se laisser piéger si facilement ! Mais comme personne n’était dupe, il finit par acquiescer, haussant les épaules avec un air vaincu. S’ils étaient tous contre lui, il n’avait aucune chance !

Heureusement, Teyn dévia bien vite la conversation, sortant une de ses expressions qu’aucun de ses parents n’avaient entendu auparavant. C’était sa spécialité, d’ailleurs, et bien malin celui qui découvrirait d’où il les sortait ! Louve s’avéra pressée de découvrir la merveille culinaire de sa fille, dont l’auteur était plutôt Tallagh, et le jeune couple, les petits dans les bras, entra dans la cuisine.

A peine le seuil franchi, le dragonnier sentit quelque chose d’inhabituel. Il n’aurait pas su dire quoi, mais c’était assez étrange. Il sentit sa jeune épouse se raidir à ses côtés, et, passant son bras autour de sa taille, se rapprocha doucement d’elle. C’est alors qu’il la remarqua : une louve de couleur rousse les fixait, immobile, de l’autre côté de la cuisine. Tallagh sut aussitôt que c’était elle, la cause de la soudaine peur de Louve. Mais quand à savoir pourquoi…

Sa femme planta ses ongles dans son bras, et il esquissa une grimace de douleur, serrant le poing pour ne pas proférer un son. Il savait Louve inquiète, tout son être le lui criait, et il demeura paisiblement à côté d’elle, ses yeux verts fixant avec animosité l’animal… qui parlait. La voix de la louve résonna dans sa tête, et il comprit aussitôt le désarroi de sa femme : son gendre. Mais alors… Polendra. La mère de Louve, qui était morte, aux dernières nouvelles. Apparemment, elle ne l’était pas tout à fait, car l’animal avait l’air bien vivant, bien campé sur ses pattes dans leur cuisine.

Tandis que la louve se transformait, laissant la place à une femme qui ressemblait étrangement à son épouse, sauf ses cheveux qui étaient la réplique de ceux des jumeaux, Tallagh songea que sa petite famille ne risquait rien. Polendra n’avait quand même pas fait tout ce chemin, braver la mort pour venir les ennuyer, non ? Le seul risque, c’était que le choc soit trop violent pour son amour. Elle se voulait forte et inébranlable, mais le dragonnier savait bien qu’il n’en était rien. Et elle croyait sa mère morte, il le savait pour l’avoir vu. Pourquoi réapparaissait-elle si longtemps après ? Pour la féliciter de son mariage et de la naissance des enfants ? Elle aurait pu se contenter d’une carte postale^^.

La voix de la louve, enfin non, de la femme, il avait un peu de mal, résonna à nouveau dans sa tête, apportant un semblant de réponse et un mystère encore plus grand. Le temps qu’ils ont décidé, oui, c’était si simple, pourquoi chercher plus loin ? Subitement, il se sentit furieux contre cette femme, cette mère qui avait eu le culot de se faire passer pour morte histoire de venir chambouler la vie de sa fille, et celle de sa famille par conséquent. Non merci, ils avaient bien assez de problème sans y mêler Polendra !

Zephril s’était blotti encore plus fort contre lui, et le jeune Parjure percevait sa détresse et son désarroi. Elle devait se demander ce qui se passait, la pauvre, et être complètement terrifiée à l’idée que ses parents restent immobiles. Tallagh n’avait pas répondu au compliment de la louve, mais il caressa les cheveux de sa fille et murmura doucement, autant pour elle que pour son frère, pour Louve et sans doute aussi un peu pour lui.

Tout va bien aller ma puce, ne t’inquiète pas.

Tout en serrant la gamine contre lui, il fixait Polendra sans pouvoir tout à fait effacer la colère qui flambait dans ses yeux. Pas la peine de la cacher, de toute façon, si elle était assez extraordinaire pour braver la mort, le fait qu’elle sache déchiffrer des émotions même enfouies ne l’aurait pas étonné outre mesure ! Il était furieux après cette femme, de venir chambouler autant celle qu’il aimait, de réapparaître après des années de silence sans autre explication qu’une jolie énigme !

Lorsque Polendra prononça le nom de Louve, si tristement qu’elle me fit, Tallagh ne put s’empêcher de la haïr davantage. N’eut été les enfants, n’eut été Louve, il aurait sûrement réagi, une inconsciente totale si l’on en jugeait la femme qui se trouvait devant lui. Mais il se contenta de la fixer de ses yeux flamboyants, serré contre Louve et prêt à la soutenir. Elle murmura quelque chose, si bas qu’il n’en comprit pas le sens, et il se sentit peiné pour elle. Pourquoi sa propre mère lui imposait-elle cela ?

Il allait prendre la parole quand Zephril le devança, interrogeant Polendra sur son identité. Le dragonnier soupira : pour une fois, la petite aurait sans doute mieux fait de se taire. Que pouvait-il répondre, lui ? Jusqu’à quel point fallait-il éclairer les enfants ? Ils ne devraient pas assister à cette scène, il le savait, mais comment les éloigner sans les effrayer plus qu’ils ne l’étaient déjà ? Et hors de question qu’il quitte sa femme, même pas la peine de penser qu’il pourrait la laisser seule en compagnie de cette inconnue qu’elle devait pourtant, à une lointaine époque, avoir appelé Maman.

Polendra répondrait, il le savait, et rien de ce qu’il pourrait faire n’y changerait rien. Il allait maintenant savoir pourquoi la femme qui se tenait devant lui était revenue, après une si longue absence : pour renouer les liens, ou plus simplement bouleverser leur vie ?

» Cherche
» Eragon je cherche ta trace ...